Le Finistère est devenu pour un jour, le 11 février, un haut lieu de la diplomatie maritime. C’est là qu’Emmanuel Macron, probable futur candidat à la présidentielle, a organisé à la hâte son « One Ocean Summit », moins de six mois après avoir annoncé sa tenue lors du Congrès mondial de la nature de Marseille, en septembre.
Cette déclinaison marine des « One Planet Summits » a donné lieu à très peu d’engagements chiffrables et mesurables. Mais il a permis de nouer des alliances de circonstance, conçues comme des accélérateurs de négociations sur la biodiversité en mer ou les rejets de plastiques.
« Il faut conclure »
Les vingt-sept États membres de l’UE, rejoints par le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie, l’Égypte et 12 autres pays, ont ainsi formé une « coalition de la haute ambition pour un traité de la haute mer ». Ces quelque 40 États plaident pour la signature, dès cette année, d’un accord international sur la protection de la biodiversité en haute mer, un quasi Far West aujourd’hui puisqu’elle échappe aux juridictions nationales. S’il voit le jour, cet instrument viendra clore un long cycle de discussions, demeurées pour l’essentiel à un niveau technique, lancées lors d’une conférence des Nations unies, en 2012, à Rio. La prochaine session, plusieurs fois reportée du fait de la crise sanitaire, doit se tenir à New York, du 7 au 18 mars.
« Ça fait dix ans qu’on prépare ce traité BBNJ [Biodiversity beyond national jurisdiction, Ndlr], maintenant il faut conclure », s’est impatienté Emmanuel Macron devant le parterre de ses homologues. « Nous en sommes proches mais nous devons donner un coup de collier », a abondé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Un accord paraphé en vitesse risquerait toutefois d’avoir un impact limité, puisque des puissances maritimes de premier ordre, à commencer par la Russie, la Chine et le Japon, n’ont pas pris part aux négociations à ce jour, comme le soulignait l’ex-ambassadeur français pour les océans, Serge Ségura, dans une interview à Contexte, en septembre.
Texte symbolique
Le sommet de Brest a aussi permis de préparer le terrain aux discussions en vue d’aboutir, à terme, à un traité international sur la pollution plastique, qui doivent avoir lieu fin février, lors de la cinquième Assemblée des Nations unies pour l’environnement, à Nairobi. France et États-Unis ont publié, en marge du sommet, un communiqué conjoint dans lequel ils « soutiennent le lancement de négociations […] sur un accord international visant à prendre en compte l’ensemble du cycle de vie des plastiques et à promouvoir une économie circulaire ». Un texte très symbolique puisque les États-Unis ont déjà donné leur aval, en novembre, aux efforts diplomatiques en faveur d’un traité, après s’être abstenus dans un premier temps de signer la déclaration jetant les bases des négociations.
Sur un plan franco-français, Emmanuel Macron, soucieux de soigner son profil écolo à deux mois du scrutin présidentiel, a annoncé que le plan de protection des cétacés au large des côtes françaises serait « accéléré », sans donner de chiffres ni de calendrier. La France doit aussi publier « prochainement » sa première stratégie polaire, là encore sans échéance précise.
La fin du plastique sur les navires de CMA-CGM
Greenpeace a fustigé « des déclarations politiques internationales qui demeurent floues sur de nombreux sujets » et « le double jeu d’Emmanuel Macron, qui continue en parallèle de défendre certaines activités néfastes au premier rang desquelles le développement de l’industrie minière en eaux profondes ». Le chef de l’État a d’ailleurs « assumé », à Brest, sa défense de l’exploration des grands fonds marins à des fins scientifiques (relire nos brèves ici et ici).
Le WWF a pour sa part salué la promesse, faite par Emmanuel Macron, de protéger les tortues de mer grâce au déploiement de filets de pêche permettant à ces animaux de s’échapper, les « turtle excluder devices » (TED). « Ça fait partie des sujets sur lesquels, là aussi, dans notre législation vis-à-vis de nos importations, nous allons renforcer les règles pour être irréprochables », a dit le président français, sans plus de précisions.
C’est finalement d’une entreprise qu’est venue l’annonce la plus palpable. Le groupe CMA-CGM, mastodonte du transport maritime mondial, a annoncé à Brest, par la voix de son PDG Rodolphe Saadé, la fin du plastique sur ses navires. « Cela permettra de ne plus avoir du plastique qui se retrouve dans certains pays où il ne pourra être recyclé », a-t-il dit.