Investir dans les « solutions fondées sur la nature » permet de répondre à trois défis majeurs qui menacent l’humanité : changement climatique, déclin du vivant et désertification. La reforestation, l’agroforesterie et la restauration des zones humides font ainsi partie des techniques permettant le plus efficacement de faire « d’une pierre trois coups ».
Pourtant, les montants investis pour mettre en œuvre la palette de solutions disponibles sont significativement en deçà de ceux requis, constate le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), dans un son « État de la finance pour la nature », publié ce 1er décembre.
D’un montant de 154 milliards de dollars par an, ces investissements devraient s’élever à 384 milliards d’ici à 2025, et à 484 milliards de dollars par an en 2030. Sous peine que l’endiguement du réchauffement climatique, la fin de l’érosion de la biodiversité et de la désertification soient « hors de portée », souligne le programme.
17 % de fonds privés
À une semaine de l’ouverture de la COP15 de la biodiversité de Montréal, sous présidence chinoise, l’exercice est une manière de mettre sur la table le sujet sensible des financements, clé de toute négociation internationale environnementale.
La grosse majorité de ces investissements sont publics, souligne l’instance onusienne. Les flux privés ne pèsent que 17 % des investissements totaux des solutions fondées sur la nature. De quoi ulcérer le PNUE :
« Cela contraste fortement avec la myriade d’engagements de neutralité carbone et “zéro déforestation” pris par les groupes agroalimentaires, banques et investisseurs […]. Les engagements volontaires d’entreprise sans limites dans le temps ni feuille de route pour leur mise en œuvre ne sont pas acceptables. »
Les financements défavorables, trois à sept fois plus importants
Autre leçon majeure du rapport du PNUE : les financements publics défavorables à l’environnement sont trois à sept fois plus importants que tous les investissements déjà alloués aux solutions fondées sur la nature. Les subventions nuisibles destinées à l’agriculture sont estimées entre 140 et 510 milliards de dollars ; celles dévolues à l’énergie, entre 340 et 530 milliards ; celles affectées à la pêche, entre 15 et 17 milliards.
C’est au fond le véritable objectif du rapport : appeler à la transition des activités économiques dans le cadre du projet d’accord international sur la biodiversité qui doit être adopté à Montréal. Plutôt que de se focaliser sur l’objectif de conservation d’au moins 30 % des terres et des océans d’ici à 2030, le plus visible des débats. Au risque de laisser péricliter les 70 % de surfaces restantes.
L’objectif de conservation de 30 % est « important », et connaît un déficit annuel de financement de 17 à 22 milliards de dollars par an, reconnaît le rapport. Mais « plus de financements doivent être alloués à la restauration de végétation naturelle et au reboisement », souligne l’instance onusienne.
Faire la jonction entre climat et biodiversité
Autre objectif du Programme des Nations unies pour l’environnement : réconcilier climat, chouchou des négociations internationales environnementales, et biodiversité, Petit Poucet des COP successives.
Pour endiguer le réchauffement à 1,5 °C, « sortir du charbon et décarboner les systèmes énergétiques ne sera pas suffisant sans investissements massifs en parallèle » dans lesdites solutions fondées sur la nature, insiste le PNUE.
Les ministres des Finances et les banques de développement ont compris l’enjeu, assurait à Contexte le 30 novembre une observatrice de premier plan des négociations, et devraient être massivement présents au « jour de la finance », prévu le 14 décembre à la COP15.