C’est la nouvelle idée des sociaux-démocrates allemands : dédommager les riverains pour la construction d’éoliennes. Le SPD défend le principe de « chèque citoyen éolien » dans le cadre de discussions au sein de la coalition et avec les Länder pour débloquer la situation dans ce secteur.
En raison de nombreuses plaintes d’habitants craignant des nuisances, les mises en service de turbines sur terre sont tombées à 940 MW l’an passé, un niveau plus vu depuis la fin des années 1990. Le corridor de développement permet pourtant une extension de 2 800 MW par an.
Ces difficultés ont des répercussions économiques pour les fabricants présents sur le territoire allemand. La grande coalition droite-gauche d’Angela Merkel se doit de trouver une solution pour garantir sa feuille de route climatique. Or, l’objectif de 65 % d’électricité renouvelable en 2030 n’est, a priori, réalisable qu’avec une extension de l’éolien terrestre.
Conservateurs à l’écoute
« Je suis persuadé que nous obtiendrons l’acceptation nécessaire (envers les éoliennes) si les personnes concernées en tirent profit », insiste le député SPD Matthias Miersch.
L’idée a germé après l’échec d’un intéressement des communes via un dispositif fiscal, refusé par les capitales régionales.
Les conservateurs de la CDU/CSU, comme l’industrie de l’éolien, se montrent ouverts à un tel dispositif. Mais plusieurs variantes sont en discussion pour associer financièrement communes et riverains. La coalition a prévu de fixer une solution d’ici à la fin du premier trimestre.
La proposition de chèque citoyen a reçu le soutien du très sérieux institut de recherche économique Ifo, sous réserve que les gestionnaires d’éoliennes prennent les paiements en charge.
« Les indemnisations devraient être limitées aux riverains concernés véritablement par l’ombre ou le bruit. Avec un dispositif adéquat, ces paiements seraient largement plus efficaces que des règles d’éloignement fixes » entre turbines et zones habitées, estime Karen Pittel, directrice du département énergie, climat de l’institut Ifo.
« Pour que des installations proches des habitations soient rentables, elles devraient compenser leur coût par un rendement éolien plus important », ajoute-t-elle.
La coalition se dispute actuellement sur le paramétrage de la règle des 1 000 mètres entre futures éoliennes et habitations. Les conservateurs veulent prendre pour référence minimum un groupe de cinq maisons. Le SPD plaide pour des zones habitées plus significatives. L’office fédéral pour l’environnement a toutefois prévenu, dans une étude publiée en novembre, que l’application de la règle des 1 000 mètres risquait, de manière générale, de diminuer de 20 % à 50 % le potentiel éolien en Allemagne, dans certaines régions de 70 % à 90 %.
Changement de paradigme
Ce chèque citoyen a fait bondir en revanche les communes, craignant un coûteux changement de paradigme. « Si on commence à payer pour garder les gens tranquilles, cela commencera avec les éoliennes puis cela s’étendra aux constructions de route et d’autres projets d’infrastructure », s’inquiète Uwe Brandl, président de l’association des communes allemandes DstGB, « si on veut la transition énergétique, il faut tolérer certaines choses, sans indemnisation ».
Le président de l’institut Ifo, Clemens Fuest, juge toutefois que ce modèle d’indemnisation n’est « pas transposable » à n’importe quelle autre politique publique.
Si l’industrie de l’éolien soutient une meilleure association financière des communes et des riverains, comme alternative aux distances réglementaires, elle estime que le point crucial reste l’implication des habitants dans les projets.
« En Allemagne, de nombreux exemples montrent qu’une participation réelle des citoyennes et citoyens conduit à ce que les riverains acceptent des écarts nettement inférieurs » entre éoliennes et habitations, soutient Hermann Albers, patron de la fédération des entreprises de l’éolien.