Budget ministériel
Après les coupes massives opérées dans le budget 2025, le budget du ministère relève légèrement la tête dans le projet de loi de finances (PLF 2026) présenté le 14 octobre, passant d’un peu moins de 23 milliards à un peu plus de 24 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE). « L’ambition écologique est maintenue », claironne l’exécutif, « quand bien même les circuits de financement », en recourant aux certificats d’économies d’énergie, « et le ciblage de certains dispositifs sont ajustés ».
Le programme « infrastructures et services de transport » enregistre une hausse de plus de 1,1 milliard d’euros de son montant (à 6 milliards d’euros au total), pour des crédits de paiement (CP) en hausse de 200 millions. La raison : le lancement prévu en 2026 d’un marché pluriannuel de location de matériels roulants pour les trains de nuit.
Une hausse de 1,2 milliard d’autorisations d’engagement est allouée à la « prévention des risques » (2,6 milliards d’euros au total). Les AE du programme « énergie, climat et après-mines » sont en forte baisse, tout comme celles du fonds vert : son montant est quasiment divisé par deux, à 650 millions d’euros (M€). Mais les crédits de paiement de ces deux programmes stagnent.
Emplois
Si le projet de budget 2026 acte la création de 8 459 postes dans l’administration, dont 5 400 dans l’éducation nationale, certains ministères perdent des postes. C’est le cas du ministère de la transition écologique (– 216 équivalents temps plein, sur 34 243 au total).
Les opérateurs de la transition écologique perdent 91 postes (sur 14 317 emplois), sans que le détail ne soit connu. « Des économies seront faites […] en s’appuyant sur une véritable réforme de l’État », a indiqué Sébastien Lecornu dans sa déclaration de politique générale à l’Assemblée, le 14 octobre, promettant de la détailler le 15 devant le Sénat, en ciblant « deux blocs massifs » : les dépenses sociales et les collectivités.
Déchets
Le PLF 2019 établissait une trajectoire de hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), qui prend fin en 2025. Dans ce PLF 2026, le gouvernement propose de nouvelles augmentations pour la période 2026-2030. La TGAP vise à inciter « les détenteurs de déchets à se détourner du stockage et, dans une moindre mesure, de l’incinération », et de favoriser les filières de tri et de valorisation. Ainsi, l’augmentation s’élèverait à environ 10 % par an pour les déchets enfouis. Actuellement fixée à 65 euros la tonne pour les déchets non dangereux, la taxe passerait à 72 euros en 2025, et à 105 euros en 2030.
La taxe pour les déchets incinérés augmenterait également, mais dans une moindre mesure. Pour les installations à haute performance énergétique et traitant des déchets non dangereux, elle passerait de 16 à 20 euros la tonne entre 2026 et 2030. Pour les installations moins performantes, elle passerait de 29 à 45 euros la tonne en 2030.
Un montant très insuffisant, pour Pauline Debrabandere, de l’ONG Zero Waste France : « Le PLF va engendrer un véritable report de l’enfouissement vers l’incinération des déchets », a-t-elle réagi auprès de Contexte, jugeant l’augmentation de la TGAP pour les déchets incinérés « pas du tout à la hauteur ». À l’inverse, Amorce, association des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l’énergie et des réseaux de chaleur, déplore une augmentation des coûts pour les collectivités territoriales, gestionnaires de déchets. L’augmentation de la TGAP crée une « véritable “gabelle“ sur un service public de première nécessité », estime Nicolas Garnier, son délégué général.
Le PLF propose par ailleurs une harmonisation à la baisse du taux de la TVA pour la gestion des déchets. Il passerait à 5,5 % pour l’ensemble des prestations achetées par les collectivités en matière de collecte et de traitement des déchets. Depuis 2019, les activités de collecte séparée, de tri et de valorisation matière bénéficient d’un taux préférentiel de 5,5 %, tandis que les autres modes de collecte sont taxés à 10 %. La différence de taux de TVA était « source d’insécurité juridique et de coûts administratifs pour les collectivités territoriales », justifie le gouvernement dans son exposé des motifs. Pauline Debrabandere juge à l’inverse cette décision « paradoxale », notant que cela revient à réduire la TVA pour l’enfouissement et l’incinération des déchets.
Plastiques
1,56 milliard d’euros : c’est le montant que la France a versé à l’UE en 2023 dans le cadre de la taxe plastiques. Le gouvernement souhaite reporter une partie de cette taxe sur les éco-organismes, à hauteur de 30 euros par tonne non recyclée, en 2026. Le montant versé par les éco-organismes serait amené à augmenter progressivement, pour atteindre 150 euros la tonne en 2030. Ce montant ne représente qu’une fraction de la taxe prélevée par l’UE, qui s’élève à 800 euros par tonne de plastique non recyclé.
Le tarif serait doublé pour les bouteilles en plastique, selon l’exposé des motifs. Toutefois, l’article affiche un montant de la taxe pour les bouteilles égal à celle qui s’applique aux autres emballages plastiques (voir l’article L. 433-120). Plusieurs interlocuteurs contactés par Contexte y voient une coquille.
Zones humides
L’article 5, qui s’attaque aux niches fiscales « inefficientes ou obsolètes », prévoit notamment de supprimer l’exonération de 50 % (voire 100 %) de la part communale et intercommunale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB), qui bénéficie aux propriétaires s’engageant à conserver des zones humides – notamment grâce à la préservation de l’avifaune et au non-retournement des parcelles agricoles.
Cette exonération avait déjà été supprimée par la loi de finances pour 2014… avant d’être rétablie par la loi biodiversité de 2016.
Financement de l’eau
Le PLF affiche un relèvement du plafond de recettes des agences de l’eau de 50 millions d’euros, à 2,398 milliards. Une progression loin de celle promise par le plan eau, qui aurait dû atteindre 175 millions d’euros en 2026. C’est d’ailleurs sur la base de cette promesse que les agences ont adopté, à l’automne 2024, leurs programmes d’intervention 2025-2030. Le seul programme de l’agence Rhône-Méditerranée-Corse, par exemple, avait prévu une augmentation de plus de 50 millions d’euros des recettes entre 2025 et 2026.
Interrogées par Contexte, les agences anticipent que les redevances prélevées dépasseront le plafond – le PLF prévoit un « rendement prévisionnel » de 2,486 milliards d’euros – et que l’État ponctionnera donc à nouveau ce qui « dépasse » pour alimenter son budget général. Car la suppression des plafonds de recettes et de dépenses, également promise par Emmanuel Macron au lancement du plan eau, en 2023, n’est toujours pas prévue.
Et la hausse de 37 millions d’euros de la redevance pour pollutions diffuses (RPD), gelée depuis les négociations entre la FNSEA et la première ministre Élisabeth Borne fin 2023, n’est pas non plus prévue par ce nouveau budget. Et ce malgré l’engagement de l’ancienne ministre de l’écologie Agnès Pannier-Runacher, réitéré à plusieurs reprises en 2025, de bien l’y faire figurer.
Le gouvernement estime que son « engagement en faveur de la biodiversité et de l’adaptation au changement climatique » se manifeste à travers le très léger relèvement (+ 2,50 M€) du plafond de la taxe annuelle sur les engins maritimes à usage personnel (Taemup), perçue par le Conservatoire du littoral.
Biocarburants
Comme attendu, le gouvernement met fin à la fiscalité avantageuse de certains biocarburants. Le tarif particulier du B100, qui coûte aujourd’hui 148 millions d’euros à l’État, est supprimé, tandis que l’avantage fiscal de l’E85 sera progressivement réduit jusqu’en 2028, entraînant une hausse de 282 % du tarif fiscal sur trois ans et une diminution des dépenses fiscales de l’État de 141 millions d’euros pour 2026.
Cette décision va dans le sens des critiques formulées dès avril par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), qui jugeait la fiscalité de certains carburants alternatifs trop avantageuse par rapport aux aides destinées aux poids lourds électriques. La Direction générale des entreprises (DGE) avait remis une pièce dans la machine en juillet, estimant dans une étude que les biocarburants n’offraient « aucun potentiel décarbonant significatif », a contrario de la technologie électrique. Les transporteurs routiers redoutaient cette réforme : le B100 reste leur principale énergie de substitution, avec 5,8 % de parts de marché en 2024, loin devant les camions électriques (1,4 %).
Forêts
D’après le dossier de presse de Bercy, le PLF propose le maintien, à hauteur de 229 millions d’euros, du financement de l’Office national des forêts (ONF).
L’action consacrée à la gestion durable de la forêt et au développement de la filière bois est stable, à hauteur de 288 millions en AE et 290 millions en CP.
La filière bénéficiera aussi d’un soutien au titre de la planification écologique, avec une enveloppe de 98 millions d’euros en autorisations d’engagement allouée au renouvellement forestier et à une gestion plus durable de la forêt, indique le document.
Divers
Les enveloppes rehaussées en 2025 du fonds Barnier et pour le retrait-gonflement des argiles sont « sécurisées » dans ce PLF 2026, indique le gouvernement.
Le fonds de secours outre-mer (FSOM) est fondu dans la dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques (DSEC). Parallèlement, le gouvernement propose d’augmenter la dotation de ce fonds de 40 millions d’euros par rapport à 2025, pour le porter à 60 M€ en CP, et 70 M€ en AE, afin de « faire face à l’intensification des dégâts climatiques dans l’Hexagone comme en outre-mer ».
L’Institut national de la consommation (INC) est dissous, et sera mis en liquidation au plus tard le 31 mars 2026. Une solution « de rebond » coûterait trop cher, justifie l’exposé des motifs. L’activité de presse, c’est-à-dire le magazine 60 Millions de consommateurs, pourra être cédée au privé.
À un mois de la COP30, l’aide publique au développement est abaissée de plus de 750 millions d’euros, à 3,67 milliards.
Un « prélèvement exceptionnel » est prévu sur les recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), qui finance l’insonorisation des logements riverains : tout ce qui dépasse 45 millions d’euros dans le « stock » de TSA des exploitants d’aéroports au 31 décembre sera reversé au budget général de l’État. Le fonds de compensation des nuisances aéroportuaires ne bouge pas, à 6,80 M€.
L’article 72 reporte d’un an la prise en compte de la redevance d’assainissement pour le calcul du coefficient d’intégration fiscale (CIF) des communautés de communes, « les effets redistributifs de cette prise en compte n’ayant pas encore pu être simulés ».
Le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique est prorogé (article 10).
L’exonération de taxe à l’essieu sur les véhicules lourds de collection est supprimée.
L’écotaxe poids lourds alsacienne voit son tarif modulé en fonction des classes d’émissions de polluants (Euro) et non plus des seules émissions de CO₂ (article 14).
Les recettes issues de la mise aux enchères des quotas carbone (SEQE-UE) affectées à l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (Anah) sont évaluées pour 2026 à 1,46 milliard d’euros, contre 700 millions en 2025.
Le plafond des recettes perçues par l’Anses sur la taxe relative à la mise sur le marché de pesticides et fertilisants demeure fixé à 10,5 millions d’euros, mais son rendement prévu est inférieur (9,50 M€). Le plafond de la taxe sur les ventes de pesticides est lui aussi stable, à 4,18 M€.